Une grande partie de l’opinion publique et des classes économique et politique connaissent aujourd’hui un engouement pour une vision du futur de la mobilité qui suppose la présence d’énergie et de matériaux abondants et peu chers, accessibles à tous, pour le siècle à venir. Or, les travaux de prospectives actuels tendent à sérieusement remettre en question ce prérequis. The Shift Project propose dans sa note d’analyse Peut-on faire mieux que le tout-voiture électrique en France, une mobilité qui soit efficiente et résiliente.
Cette note évalue les conséquences de la mise en place à long-terme (deuxième moitié du XXIème siècle) d’un ensemble d’incitations et contraintes dans les domaines de la mobilité et de l’aménagement du territoire. Ce cadre fait émerger un système de mobilité efficient en termes de consommation d’énergie et de matériaux. Au contraire, si ce cadre n’est pas mis en place, un système en continuité du système de mobilité actuel émerge, reposant essentiellement sur l’usage de la voiture individuelle. Nous montrons qualitativement que le système efficient est supérieur au système en continuité selon de multiples dimensions environnementales et sociétales. Cela étant montré, restera la question de la transition concrète vers le système de mobilité efficiente, non abordée dans cette note.
Une approche systémique
Cette vision efficiente est construite suivant une approche utilisée en ingénierie des systèmes, partant d’une caractérisation des besoins en mobilité (les motifs de déplacement), des différentes contraintes extérieures à ce système de mobilité, et des interactions directes avec d’autres secteurs, afin de concevoir un système répondant aux besoins tout en restant dans le cadre des contraintes (voir figure ci-dessous). Ainsi, les deux systèmes de mobilité comparés répondent aux mêmes besoins de mobilité, considérés comme étant identiques aux besoins actuels.
Deux modèles pour deux visions
Deux visions de systèmes de mobilité sont ainsi comparées : la vision dite tout-voiture électrique, dans la continuité du système actuel, et la vision dite de mobilité efficiente, qui se présente comme une vision alternative. Cette dernière, contrairement au tout-voiture électrique, suppose la mise en place d’un système d’incitations et contraintes visant à assurer la mobilité des personnes de manière efficiente, du point de vue de la consommation d’énergie et de matériaux, en tenant compte du cycle de vie du matériel.
L’objectif : réduire les externalités négatives
Notre analyse affirme la possibilité de répondre aux besoins en mobilité tout en réduisant les différentes externalités de cette mobilité, y compris globales, en comparaison à la vision de continuité tout-voiture électrique : émissions de CO2 (sur le cycle de vie), polluants locaux, inégalités d’accessibilité, résilience, emprise au sol, indépendance en énergie et en matériaux de la France, consommation de ressources énergétiques et de matériaux…
Une comparaison qualitative
La comparaison est faite de manière qualitative, en raison de l’absence de données quantitatives quant à l’élasticité des comportements en présence ou non d’un ensemble de mesures. Cette note n’évalue pas le caractère optimal ou non de la vision mobilité efficiente (en termes de coûts pour obtenir les mêmes résultats). Des analyses quantitatives pourraient être réalisées pour conforter ces comparaisons qualitatives et mettre en évidence les différences d’ordre de grandeur entre les deux visions.
Une remise en question du système actuel
Les éléments-clé de la vision efficiente sont une évolution de l’aménagement du territoire, une affectation des espaces de voirie et de stationnement en faveur des modes peu énergivores (sur leur cycle de vie), et des incitations à usage accru de ces modes.
Le système de mobilité qui émerge de la mise en place de ce cadre favorise les modes individuels actifs, ou légers et électrifiés, proposés en tant que service plutôt que propriété individuelle (économie de la fonctionnalité). Dans certaines situations (transport de charge ou de personnes, distances quotidiennes plus longues), des modes individuels plus lourds, adaptés aux besoins, loués ponctuellement ou en longue durée, sont disponibles. Les transports en commun classiques et les transports en commun express sont disponibles respectivement dans les zones denses et moyennement denses.
Lire la note d’analyse :