Étude de CDC Climat sur les financements climatiques en France : compte-rendu de la conférence

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Les résultats de l’étude menée par CDC Climat Recherche sur le panorama des financements dédiés au changement climatique en France ont été rendus publics le 21 octobre 2014 à l’occasion d’une conférence et table-ronde co-organisées par The Shift Project et CDC Climat.

Emmanuel Massé, Marie Gérard, Christine Delamarre, Charles Dupont et Alain Grandjean22 Milliards € investis pour le climat en France en 2011

Sur la base d’une méthodologie développée par Climate Policy Initiative et reconnue internationalement, l’ensemble des investissements dédiés à des projets réduisant les émissions de gaz à effet de serre a été étudiée par CDC Climat Recherche. Comme l’a expliqué Romain Morel (CDC Climat), ces investissements représentaient, en France, plus de 22 Milliards € en 2011, répartis de la façon suivante : 9 Milliards € dans les énergies renouvelables, plus de 8 Milliards € dans l’efficacité énergétique et entre 2 et 4 Milliards € dans les infrastructures de transport durable. L’étude ne permet pas de juger de l’adéquation des financements avec les besoins de la transition énergétique mais de savoir que les ordres de grandeur en question ne sont pas éloignés. La marche à franchir n’est peut-être pas aussi haute qu’on le suppose.

Des liquidités d’ores et déjà disponibles ?

Tous les intervenants de la table ronde ont insisté sur la disponibilité actuelle des fonds nécessaires à la transition énergétique. Ainsi, Emmanuel Massé, sous-directeur des politiques sectorielles à la Direction générale du Trésor, a rappelé que l’investissement en capital fixe en France représentait environ 22% du PIB français, soit 467 milliards €. Les ordres de grandeur évoqués dans l’étude n’étaient de ce fait pas très importants, ce qui tend à démontrer que les investissements requis dans le cadre de la transition énergétique sont à notre portée, propos qu’a notamment appuyé Pierre Ducret, PDG de CDC Climat, dans son introduction à la conférence.

Marie Gérard, vice-présidente sustainable development, management and performance à GDF Suez, a quant à elle évoqué les « green bonds » émis par son entreprise qui a ainsi levé, le 12 mai dernier, 2,5 Milliards € répartis en deux lots rémunérés à 1,37% à 6 ans et à 2,37% à 12 ans. Ceux-ci ont fait l’objet d’une sursouscription (7 Milliards €) et démontrent l’intérêt croissant des investisseurs pour la transition énergétique. 36% de financeurs étaient des acteurs financiers privés non institutionnels, illustrant ainsi un « attrait mainstream » de la finance pour le bas carbone.

Dans ce cadre, les témoignages du Crédit Agricole comme d’AXA-IM ont montré que tant le secteur bancaire que le secteur des assurances se mobilisaient sur ce type de financement, quitte à développer des expertises en interne pour accompagner des projets de taille moyenne et les ETI.

Trois besoins : rentabilité, stabilité et visibilité

Néanmoins, pour les trois représentants du secteur privé qui participaient à la table ronde, la rentabilité des projets constitue l’obstacle premier à l’investissement dans la transition énergétique. Les « green bonds » de GDF Suez présentaient par exemple pour Charles Dupont, directeur de l’activité de financement des infrastructures à AXA IM, des taux faibles. Ceux-ci sont dus au prix du marché, qui est déterminé dans ce cas précis par l’abondance de capitaux face à un manque de projets de la qualité de celui de GDF Suez. La nécessité de recourir à des subventions pour rendre plus rentables certains projets a ainsi été évoquée à plusieurs reprises.

Enfin, le besoin de « stabilité » et de « visibilité » a été très largement évoqué. Charles Dupont a ainsi souligné que la politisation de la transition énergétique faisait émerger la question de la pérennité des investissements. Christine Delamarre, déléguée générale d’Ufinergie et directrice ingénierie à Crédit Agricole Leasing, a, quant à elle, précisé le constat de M. Dupont en faisant état de l’existence d’un « effet ciseau » entre une instabilité règlementaire se traduisant notamment par la baisse de subventions et une rentabilité des projets qui stagne. Elle a aussi regretté des règles prudentielles (Bâle 3, Solvancy 2) qui restent à améliorer pour encourager l’investissement de long terme.

L’incertitude des modèles économiques semblait également être au cœur des préoccupations des investisseurs. En effet, si le secteur des infrastructures peut faire preuve d’une certaine stabilité, le secteur de la biomasse par exemple est soumis à une double incertitude : le prix d’achat du bois et les prix de rachat électrique.

La transition, mais dans quel contexte ?

Cette conférence s’est voulue une contribution à l’immense chantier qui consiste à réfléchir aux modalités de financement de grands projets, à la rentabilité incertaine dès lors que l’on ne sait pas prendre en compte les externalités, dans un contexte global de ralentissement du à une ressource énergétique contrainte.

Jean-Marc Jancovici, président de The Shift Project, a conclu la matinée en ouvrant à des réflexions supplémentaires. Il a mis sur la table un problème fondamental. Si on admet que l’énergie, parce qu’elle représente la transformation physique de notre environnement, est un déterminant de premier ordre, sinon le déterminant de premier ordre du PIB, alors on se retrouve face à une question relativement inédite depuis le début de la civilisation industrielle : comment financer un besoin croissant ou constant d’infrastructures dans un PIB qui a toutes les chances de décroître de manière structurelle ?

Vidéo YouTube de la conférence

PowerPoint de la conférence


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