Tel est le nom du séminaire scientifique qui s’est tenu du 2 au 7 février 2014 à l’Ecole de Physique des Houches, dans les Alpes. Les organisateurs, dont certains membres de l’équipe du Shift, ont réuni une soixantaine de chercheurs, d’étudiants et de professionnels de plusieurs continents et disciplines : physique, économie, ingénierie, histoire. L’objectif ? Faire avancer les aspects méthodologiques de l’étude et de la création de scénarios énergétiques.
La problématique énergie-climat et la transition énergétique ont constitué le cadre de réflexion, nous rapporte Jacques Treiner, professeur de physique à Sciences-Po Paris et co-organisateur. Il s’agissait d’aborder la question suivante : « comment envisager le développement énergétique futur de l’humanité, sous la contrainte de ressources minérales et fossiles finies et avec l’objectif d’une diminution rapide de nos émissions de gaz à effet de serre ? ».
Mettre les scénarios au service des politiques publiques
En filigrane se trouve l’idée d’améliorer la scientificité de la scénarisation énergétique, d’où le titre du séminaire, auquel vient se rajouter une question : « Interdisciplinary energy prospective: towards a common toolbox for scenario assessment and design? ». L’objectif à terme est de permettre l’émergence d’une communauté scientifique utilisant des critères pertinents et reconnus (« boîte à outils ») dans l’élaboration des scénarios énergétiques.
Participant(e)s, à l’Ecole de Physique des Houches, février 2014
L’équipe de The Shift Project se réjouit de la tenue et du succès de cet événement. En effet, le travail du Shift autour de la scénarisation énergétique (analyse de scénarios énergétiques, Data-Portal, Rogeaulito), lancé en 2011, a initié la réflexion qui a mené au séminaire. Le think-tank se positionne à l’interface du monde académique, des entreprises, de la société civile et des pouvoirs publics, et vise par le biais de ses travaux à améliorer la coordination entre la science et les politiques publiques (« policy »).
Afin de permettre la prise en compte des scénarios énergétiques dans la définition des politiques publiques en matière d’énergie, d’économie et de climat et des choix stratégiques des entreprises, il faut donner un caractère scientifique à la scénarisation énergétique. Il est impératif de rendre les scénarios compréhensibles et utilisables par les acteurs publics, la société civile, les ingénieurs et les entreprises. C’est pourquoi le Shift a mobilisé des ressources pour co-organiser le séminaire.
Les bons ingrédients : collaboration, matière première et méthode
Le résultat était difficile à anticiper, mais les avis convergent pour dire que la semaine a été très fructueuse ! Explications. Le séminaire s’est déroulé en trois temps : un premier où différents scénarios ont été présentés ; un deuxième où les modes d’évaluation des ressources (matières premières et énergie) ont été confrontés ; un troisième, plus économique, dédié à l’évaluation de l’énergie comme facteur de production.
Selon les participants, la « méfiance » des disciplines les unes envers les autres a été dépassée, laissant place à l’écoute, voire un véritable enthousiasme à l’apport de nouveaux angles d’approche. En effet, il transparaissait que les scénarios s’éclairaient les uns les autres – par exemple « ceux qui imposent des contraintes sur le mix énergétique et ceux qui déterminent un mix énergétique à partir des seules contraintes démographiques et climatiques », nous dit Jacques Treiner. De plus, ces éclairages nécessitent d’expliciter le lien entre croissance et énergie, faisant appel aux compétences des économistes.
Une autre partie du succès tient à l’expérience de la transition énergétique allemande. Des décisions fortes prises dans un grand pays européen permettent de mettre en lumière certaines contraintes, arbitrages et opportunités. Les données produites apportent de la matière première à la science pour tester la validité et éclairer les postulats des scénarios énergétiques. Les échanges sont ainsi plus fructueux et plus concrets.
Des pistes de travail collectif
Une réflexion sur la définition, le statut, la transparence, la reproductibilité, la comparaison et l’éclairage mutuel des scénarios énergétiques a été amorcée au fil des discussions.
Succès, donc. Il s’agit maintenant de transformer l’essai en inventant un cadre de réflexion, une communauté autour de la scénarisation énergétique. Un consensus a émergé pour donner un cadre institutionnel, et quelques idées ont circulé pour donner suite au projet, au sein duquel devront pouvoir collaborer des chercheurs de plusieurs disciplines.
A propos de l’organisation
Les présentations, le programme et la liste des intervenants sont disponibles en ligne.
Le séminaire, fruit de la collaboration entre The Shift Project, le CEA et l’ADEME, a aussi bénéficié d’un financement d’EDF. Son conseil scientifique rassemble Yves Bréchet (Haut-Commissaire à l’Énergie Atomique), Gérald Bronner (Université Paris-Diderot), Valérie Masson-Delmotte (CEA/LSCE), Jacques Percebois (Université de Montpellier), Semida Silveira (KTH, Stockholm), Friedrich Wagner (Max Planck Institut). L’organisation a été l’affaire de Léo Benichou (The Shift Project), Hervé Bercegol (CEA), François Daviaud (CEA), Jean-Marc Jancovici (The Shift Project) et Jacques Treiner (Sciences Po Paris).
Pour entrer en contact avec les organisateurs, veuillez contacter ce dernier, M. Jaques Treiner : jtreiner@orange.fr