Le débat sur l’énergie dans la course à l’Élysée est quelque peu délaissé selon beaucoup d’observateurs. Ce désintérêt pour des enjeux pourtant cruciaux se manifeste souvent dans les approximations et erreurs que politiciens et journalistes véhiculent, sans se rendre vraiment compte de l’impact de leurs propos. La traditionnelle confusion entre consommation d’électricité et consommation d’énergie s’est vérifiée une nouvelle fois dans une interview du candidat Nicolas Sarkozy publié sur le site Actu-Environnement.com. Argumentant sur son choix de continuité du nucléaire, l’actuel Président fait la déclaration suivante : « S’agissant des énergies fossiles, elles ne représentent aujourd’hui que 10% de notre consommation d’énergie et je souhaite que cette part reste faible. »
Or c’est environ 10% de notre consommation d’électricité (énergie finale) qui est d’origine fossile. Si l’on parle de notre consommation totale d’énergie primaire, la part des énergies fossiles s’élève plutôt à environ 55%. Dans ces derniers 55%, une part majoritaire est attribuable au transport, fortement dépendant des énergies carbonées puisque plus de 90% de la consommation énergétique finale de nos véhicules est issue du pétrole. En fait, lorsqu’on avance des chiffres sur l’énergie, il faut bien préciser dans quel cadre on se trouve : énergie primaire (ressources brutes disponibles dans la nature) ou énergie finale (facturée au consommateur final), l’électricité ne représentant par ailleurs qu’une partie au sein de l’énergie finale que nous utilisons. Nous laissons le lecteur se reporter aux graphiques ci-dessous qui rappellent la relation entre énergie primaire, finale et l’électricité. Les graphiques montrent bien que si les énergies fossiles sont à l’origine de 11% de cette énergie finale qu’est l’électricité, elles pèsent bien plus lourd dans les consommations totales d’énergie primaire (55%) ou finale (plus de 65%).
Bref, s’il y a une chose à retenir, c’est que la juste appréciation de la dépendance de la France aux énergies fossiles se fait sur les consommations totales d’énergie primaire ou finale. Regarder (délibérément ou non) le problème uniquement sous l’angle de l’électricité revient à en oublier la plus grosse partie. Dans les faits, la France est donc bel et bien toujours dépendante des énergies fossiles, qui contribuent de manière significative à l’envolée de la facture énergétique du pays qui a atteint, en 2011, un nouveau record de plus de 60 milliards d’euros.
Joseph Hajjar et Bastien Praz