Nous espérons que vous et vos proches surmontez autant que possible l’épreuve difficile à laquelle nous sommes collectivement confrontés. Aujourd’hui, l’urgence est bien évidemment sanitaire. La priorité de l’État et de tous les acteurs de notre société doit être de contenir et de lutter contre la pandémie, et de faire face à ses nombreuses conséquences immédiates sur nos vies. Pourtant, il nous faut dès maintenant préparer une société résiliente aux chocs. Préparer l’avenir : c’est bien le rôle du Shift Project, et c’est donc ce à quoi s’attèle l’équipe depuis quelques semaines avec une détermination renouvelée (vous pouvez découvrir ou soutenir ce travail ici).
Il est frappant de constater que nous avons modifié en profondeur, très rapidement bien que parfois difficilement, nos habitudes et nos façons de vivre. De nombreux actes de solidarité et d’entraide ont été observés, preuve de la capacité humaine à faire société quand la situation l’exige. Cela invite à une certaine confiance quant à la possibilité de faire face à d’autres impératifs, notamment ceux qui mobilisent The Shift Project depuis sa création : la dépendance aux énergies fossiles et le changement climatique.
Des activités toutes interdépendantes
Mais la crise déclenchée par le Covid-19 a également rappelé les liens qui existent entre nombre d’activités de notre société. Beaucoup sont interdépendantes, et la notion d’activité essentielle a pris une tournure toute particulière.
Les gardes d’enfants, le ramassage des poubelles, le réassortiment des étals, les aides-soignant.e.s, la poste, l’agriculture etc. : toutes ces activités n’étaient pas toujours comprises comme essentielles à la bonne marche de la vie en France.
Ainsi, nous redécouvrons comment nos destins sont liés dans une chaîne ininterrompue d’activités humaines ; quand des maillons essentiels de la chaîne se fragilisent, c’est bien la vie qui se fragilise.
L’énergie, au cœur de nos sociétés
Ceci est également vrai pour l’énergie qui alimente notre économie. De ce point de vue, d’autres perspectives, plutôt sombres, appellent aussi à la plus grande vigilance.
Tout d’abord, la chute vertigineuse des prix des énergies carbonées (au premier rang desquelles le pétrole) – sous la double impulsion des tensions géopolitiques et d’un déséquilibre offre-demande inédit – est de nature à renforcer leur attractivité à court terme, et donc de ralentir les mesures nécessaires à leur remplacement.
Pétrole : un risque pour la reprise et la stabilité
Mais à plus long terme, ces industries pétrolières et gazières sont elles-mêmes menacées par leur perte de solvabilité dans de telles conditions de marché : faute d’investir, leur capacité de production future se dégrade. Et l’énergie est bien plus qu’un maillon de la chaîne qui relie les secteurs économiques, c’est le sang des machines, aujourd’hui centrales au fonctionnement de la plupart des secteurs économiques ! Une crise majeure de ce secteur causerait des dégâts à toute la société.
Par ailleurs, plus la baisse des prix s’avère durable, plus elle est susceptible de déstabiliser les finances publiques de pays fortement dépendants de la rente pétrolière, comme l’Algérie – dont la production de pétrole est dite « mature ». Certains équilibres régionaux risquent d’être déstabilisés, comme celui déjà précaire du bassin méditerranéen.
Pas de recette magique : il faut décarboner
Ensuite, face à l’actuelle contraction économique d’ampleur causée par le confinement, les gouvernements du monde entier s’apprêtent à engager un plan de relance et d’investissement massif. Or, mal dirigés, ces investissements pourraient encore renforcer la dépendance de nos sociétés à un approvisionnement en énergies fossiles fragilisé, et ce faisant aggraver la crise climatique qui se prépare.
Nous sommes donc pris en étau entre deux risques. D’un côté, la faiblesse du prix du pétrole peut, si elle dure, tout à la fois conduire à augmenter la dépendance des pays importateurs et les émissions de CO2 afférentes dans un contexte de relance non discriminante, et déstabiliser les pays exportateurs. De l’autre, la remontée des prix peut, si elle est brutale, mettre un coup d’arrêt à la reprise économique et déstabiliser les pays importateurs. Pas de recette magique pour desserrer l’étau : le seul moyen est de décarboner l’économie.
Des choix structurants
En 2008, les États avaient relancé la machine économique tous azimuts, et l’argent peu cher avait notamment favorisé l’émergence des pétroles et gaz de schiste. Aujourd’hui, il s’agit d’orienter les emplois et de faire les bons investissements en masse pour accélérer notre sortie de la dépendance aux énergies fossiles et ainsi mener une transition vers une société plus résiliente, avec des modes de vies tenables dans la durée. « Il nous faudra bâtir une stratégie où nous retrouverons le temps long, la possibilité de planifier, la sobriété carbone, la prévention, la résilience qui seules peuvent permettre de faire face aux crises à venir », a déclaré lundi 13 avril au soir le Président de la République.
Dans ce contexte, The Shift Project est plus que jamais déterminé à jouer le rôle qui est le sien : appréhender les systèmes globaux (de production, d’usages, de formation, de technologie, de cadre d’analyse, etc.), concevoir, proposer, influencer, et peser sur les choix structurants qui seront très prochainement faits.
Comme chaque Français et chaque Française s’est mobilisé pour tenir sa place dans la lutte contre la maladie, The Shift Project répond présent. Son équipe permanente, ses adhérents et sa multitude de bénévoles donneront le temps nécessaire à l’analyse, à la conception d’argumentaires, à la mise en avant de propositions nouvelles, et à l’élaboration d’un imaginaire collectif pour ‘faire société’.
—
Comment faire pour aider ? Pour recevoir des nouvelles des travaux du Shift, inscrivez-vous à notre Newsletter. Si vous souhaitez soutenir nos travaux financièrement, il encore possible de contribuer à travers la page HelloAsso dédiée. Vous pouvez également rejoindre le réseau des bénévoles du Shift, organisés au sein de l’association The Shifters.