Aller au contenu principal

17 juin 2025

Rapport final : Décarbonons les industries de Santé

Avec un volet sur les médicaments et un autre sur les dispositifs médicaux

Rapport final

À propos de la publication

Pour la première fois en France, The Shift Project propose une évaluation carbone des médicaments et des dispositifs médicaux appuyée sur des données physiques, et met en  avant des solutions concrètes pour la décarbonation des industries.

Dans ses deux rapports – « Décarbonons les Médicaments » et « Décarbonons les Dispositifs Médicaux » -, l’équipe santé de The Shift Project met en lumière l’empreinte carbone significative des industries de santé, avec plus des émissions de 9,1 millions de tonnes équivalent CO₂ pour les médicaments consommés en France, et une estimation de 7,4 millions de tonnes équivalent CO₂ pour les dispositifs médicaux.

Cependant, il existe un potentiel prometteur de décarbonation à l’horizon 2050, avec une réduction possible de 70% en moyenne pour les médicaments et les dispositifs médicaux. Pour atteindre ces objectifs, il est crucial que la décarbonation couvre chaque maillon de la chaîne de valeur des industries de santé, assurant ainsi une transition complète et efficace vers des pratiques plus durables.

Une empreinte carbone de plus de 9 MtCO₂e pour les médicaments consommés en France

Les émissions sont dominées par la production des principes actifs (25%), dont l’empreinte carbone moyenne est estimée à 65 kgCO₂e/kg. C’est près de 105 fois plus que l’intensité carbone du ciment. Ce résultat est lié à la localisation des usines de production des principes actifs, principalement en Asie où les mix énergétiques sont fortement carbonés, ainsi qu’aux fortes consommations d’électricité et de vapeurs pour les produire.

30 % des émissions proviennent des activités de R&D et des activités corporatives des industries pharmaceutiques. Elles sont notamment liées aux essais cliniques, aux achats de biens et services, aux consommations énergétiques des bureaux, et aux déplacements professionnels des collaborateurs terrains (dont congrès médicaux).

7% des émissions, soit 650 000 tonnes de CO₂e, proviennent de l’usage des gaz médicaux. C’est équivalent aux émissions générées par plus de 75 000 tours de la terre en voiture thermique.

Une empreinte carbone estimée à 7,1 MtCO₂e pour les dispositifs médicaux

Les émissions de gaz à effet de serre relatives à la production des dispositifs médicaux pour la consommation des français sont estimées à 7,4 MtCO₂e, soit l’équivalent des émissions annuelles des habitants de Marseille.
Ces émissions proviennent en grande partie de la production des matières premières mobilisées :

  • Le plastique d’abord : 200 000 tonnes de plastique par an, soit l’équivalent de la consommation annuelle en plastique de 2,8 millions de français. 
  • Mais également une grande quantité d’acier, d’aluminium, et de composants électroniques, ainsi que des procédés de transformation, qui représentent les émissions des sites de production des industries du DM. 

Les transports, la production des emballages, l’utilisation, et la fin de vie représentent des émissions relativement plus faibles. Ces émissions peuvent tout de même être significatives pour certains produits : par exemple, la consommation électrique des équipements électro-médicaux, ou le transport dans le cas du recours au fret aérien.

 

Un potentiel de décarbonation à 2050 de 68% pour les médicaments et de 72% pour les dispositifs médicaux

Si rien n’est fait, les émissions annuelles des industries de santé risquent d’augmenter fortement. Cette hausse serait due à la consommation accrue de produits de santé engendrée par le vieillissement de la population, l’augmentation des maladies chroniques, les conséquences du dérèglement climatique et à l’évolution  des produits proposés. Parmi ces évolutions, on note le développement de biothérapies et des thérapies géniques, de la médecine personnalisée adaptée aux profils des patients, l’intégration du numérique dans les dispositifs médicaux.

Conformément à la Stratégie nationale bas carbone (SNBC), le secteur doit faire sa part dans la lutte contre le changement climatique et baisser ses émissions annuelles d’ici 2050. Il doit le faire rapidement, pour limiter le cumul de ces émissions entre 2025 et 2050. 

Dans nos modélisations à 2050, nous ne tenons pas compte de l’évolution des consommations de médicaments entre 2025 et 2050. Les leviers de décarbonation identifiés permettent aux industries des dispositifs médicaux de diminuer de 72% les émissions associées à la consommation actuelle de dispositifs médicaux entre 2025 et 2050. Toutes ces industries doivent jouer leur part dans cette décarbonation, et chacune a des leviers qui lui sont propres : consommables, équipements d’imagerie, aides techniques, implants, etc. De la même manière, dans notre scénario central, le potentiel de décarbonation des industries du médicament est de 68% entre 2025 et 2050.

Une décarbonation qui doit couvrir chaque maillon de la chaîne de valeur des industries de santé

Pour être pleinement efficace, la décarbonation doit couvrir chaque maillon de la chaîne de valeur, de la production des matières premières à la logistique, en passant par l’énergie consommée et la gestion de la fin de vie. Tous les acteurs impliqués doivent agir rapidement et fortement en mobilisant simultanément tous les leviers. Aucun n’est optionnel, tous sont nécessaires. 

Ainsi, une décarbonation des industries de santé doit impliquer différents leviers : 

  • Des leviers pour décarboner les procédés de production : par exemple une électrification de la production de vapeur industrielle ;
  • Des leviers pour décarboner la logistique : par exemple diminuer le recours au fret aérien pour l’importation des équipements d’imagerie ;
  • Des leviers pendant l’usage des produits de santé, par exemple privilégier des instruments réutilisables à leurs équivalents jetables, ou encore arrêter la distribution protoxyde d’azote par les réseaux de l’hôpital. En effet, 90% du protoxyde d’azote distribué dans les réseaux fuit. Autrement dit, il faut produire, et donc relâcher, 10 fois plus de protoxyde d’azote que ce qui est consommé ;
  • Des leviers pour décarbonation les essais cliniques avec la réduction du gaspillage de médicaments et par une optimisation des cohortes, réduisant les visites et déplacements.

 

En parallèle, nous préconisons également des leviers transverses pour faciliter la décarbonation : 

    • D’engager les fournisseurs dans l’élaboration de stratégies de réduction de leurs émissions : la décarbonation du secteur repose avant tout sur la mobilisation des fournisseurs (chimie, plasturgie, métallurgie, textile, électronique, logistique, stérilisation ou mécanique)
    • De relocaliser une partie de la production des produits de santé en Europe : la production de médicaments en France réduirait de 50% les émissions par rapport à une production en Chine, tandis qu’une production en Europe les diminuerait de 40 %. Relocaliser la production accroît la résilience des chaînes de valeurs et du système de soin dans son ensemble, et fait gagner en souveraineté sanitaire.
    • De définir des critères carbone standardisés : adopter une méthode de calcul de l’empreinte carbone standardisée compatible avec la pluralité des produits de santé et choisir un critère environnemental où les considérations liées à l’empreinte carbone pèsent au moins 10% dans la note globale d’évaluation. 
    • Une consolidation de la recherche académique : certains segments restent encore peu étudiés, et les spécificités industrielles sont parfois omises. Il est indispensable de mener des analyses de cycle de vie rigoureuses, sans quoi les résultats peuvent être faussés.
  • Impliquer tous les professionnels des industries : Pour être structurante, la stratégie environnementale doit être portée au comité de direction et s’inscrire pleinement dans la gouvernance de l’industrie. De plus, chaque fonction (production, achats, logistique, R&D, marketing) a un rôle à jouer. 

L'équipe

  • Mathis Egnell, Ingénieur de projet et pilote du programme Santé au Shift Project
  • Baptiste Verneuil, Chargé de projet et pilote Industries des dispositifs médicaux au Shift Project
  • Robin Henocque, Pharmacien chargé de mission Industries de santé au Shift Project
  • Margot Aubusson de Cavarlay, chargée de projet santé au Shift Project
  • Héloïse Lesimple, Pilote communication du programme Santé au Shift Project
  • Mona Poulain, Chargée de communication du programme Santé au Shift Project
  • Jean-Noël Geist, Coordinateur du programme Santé au Shift Project
  • Thomas Rambaud, (chef de projet Industries de Santé au Shift, consultant dans une entreprise de service en santé et membre des Shifters)
  • Laurie Marrauld, (cheffe de projet Santé au Shift, maîtresse de conférence en santé publique à l’EHESP et titulaire de la Chaire RESPECT)
  • David Grimaldi, Médecin réanimateur et conseiller scientifique Industries de Santé au Shift Project

 

Remerciements

Nos dernières publications

Toutes les publications

Le Shift lance sa nouvelle campagne de financement participatif

Décarbonons la France !

Soutenez le programme d’action du Shift Project pour 2027 : deux années pour construire des propositions et peser sur l’élection présidentielle.

En participant à cette campagne de financement participatif, vous nous donnez la capacité d’influencer les décideurs économiques et politiques. Vous contribuez à ce que les idées portées par le Shift trouvent un large écho, pour échapper au compte à rebours de la dérive climatique et de l’épuisement des ressources.

En soutenant le Shift, vous envoyez également un message fort. Rigueur scientifique et impartialité – deux valeurs fondatrices du Shift – sont au service de l’intérêt général : pour guider la société, il est vital de défendre la rationalité.

Je soutiens le Shift !