« Décarbonons les Stades » : The Shift Project publie son nouveau rapport intermédiaire sur le football et le rugby

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L’équipe Sport du Shift Project est heureuse de vous présenter la seconde version de son rapport intermédiaire estimant l’empreinte carbone des stades et des matchs de football et de rugby, à la fois professionnel et amateur !

Vous pouvez déjà :

La 1ère version de ce rapport intermédiaire (mars 2024) portait sur les grands postes d’émissions de gaz à effet de serre lors des rencontres sportives, les principales raisons des consommations d’énergie fossile et des émissions du secteur. Il indiquait combien un match de football/rugby professionnel émet de gaz à effet de serre. Ce second rapport, en plus d’affiner nos calculs et de proposer des leviers pour décarboner le secteur professionnel, élargit à dessein le périmètre en y incluant une partie indispensable aux activités sportives dans les stades : le milieu amateur, avec ses 2,5 millions de licenciés.


Votre participation aux travaux 

Le travail qui vous est présenté ici est exploratoire : il vise à initier de nouvelles discussions et pose sur de nombreux sujets davantage de questions qu’il n’en résout. Bien qu’il soit déjà le fruit d’un travail collectif, ce rapport intermédiaire est une base de travail qui vise à être amendée et enrichie en vue du rapport final qui sera publié début 2025. Nous avons besoin de vous ! Toutes les relectures et contributions sont les bienvenues. Nous vous prions d’envoyer vos remarques, critiques et propositions à l’adresse suivante : sport@theshiftproject.org

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Pourquoi s’intéresser au Sport ?

Pourquoi nous, acteurs et actrices du secteur sportif, souhaitons que le sport soit abordé par le Shift Project, qui travaille sur le climat et l’énergie ? Le sport est un contributeur majeur au développement humain, un puissant facteur de cohésion sociale et de rapprochement des peuples. Rares sont les secteurs pouvant réunir pendant quelques heures des millions – voire des milliards – de personnes : à la fois festif et rempli d’émotions, de joie, parfois de déception et de tristesse, mais qui le rend si unique.

Le sport professionnel propose une caisse de résonance sans pareil (23 millions de personnes suivent par exemple la Ligue 1 de football), et permet de diffuser des messages structurants – celui de la décarbonation par exemple. Le sport amateur (avec près de 2,5 millions de licenciés pour les seuls football et rugby) est un pilier de la vie familiale, et l’économie et du lien social local, de la santé et du bien-être des Français – en particulier pour les plus jeunes. Au-delà, nous avons la conviction que le sport a le pouvoir, à son échelle, de transformer la société.

Un travail initié par un collectif d’amoureux du sport

Pour travailler sur le sport, nous avons d’abord constitué une équipe : un collectif d’amoureux du sport capable d’apporter leur expérience, leur connaissance et leur expertise. Un collectif qui souhaite donner toutes les clés au secteur pour qu’il puisse s’organiser pour perdurer, qu’il continue à nous faire vivre et à nous faire rêver.

Nous, anciens sportifs de haut niveau, athlètes, sportifs amateurs, cadres de structures, membres d’associations, techniciens et experts du milieu ou tout simplement passionnés de sport, avons de l’ambition pour notre secteur.

Parce que nous voulons continuer à pratiquer, continuer à nous réjouir, continuer à nous émouvoir.

Parce que, fidèles à la devise olympique « plus vite, plus haut, plus fort », nous relevons le défi collectif de l’atteinte des objectifs climatiques, et souhaitons répondre « présent ! » sans tricher. 

La double contrainte carbone – que constituent le réchauffement climatique et la déplétion des ressources énergétiques – a une forte dimension technique et est potentiellement anxiogène. Sachant cela, en aucune manière l’objectif n’est de culpabiliser le secteur, d’effrayer ses sportifs et ses professionnels, ou d’en grever son activité. L’ambition est au contraire de le transformer pour permettre au plus grand nombre de continuer à aller voir des manifestations sportives et à pratiquer une activité régulière, en tenant les objectifs climatiques et sans craindre la blessure en cas de crise énergétique.

Une première brique : décarboner les stades et les matchs de football et de rugby

La question vitale du changement climatique progresse doucement chez certains acteurs sportifs. Leur grande majorité a conscience d’être des exemples, et qu’ils peuvent et doivent être des sources d’inspiration. Le secteur prend peu à peu conscience des impacts du changement climatique qui s’aggravent. Pourtant, le secteur manque cruellement de données sur son empreinte carbone, sa vulnérabilité aux crises énergétiques et son potentiel de décarbonation.

Ce travail a été présenté et discuté le 19 mars à Lyon et les 2 et 3 juillet 2024 à Paris. Il pourra monter en puissance, selon la méthode itérative usuelle du Shift Project, qui consiste à accueillir des précisions additionnelles : la balle est dans votre camp !

Synthèse des résultats provisoires

Une évaluation inédite – quoiqu’encore intermédiaire – de l’impact climatique des stades et des matchs de football et du rugby en France

À l’heure du changement climatique et de la raréfaction des ressources, la prise en compte des contraintes environnementales devient une condition de survie et a fortiori  de développement. Dans un XXIe siècle qui nous impose de penser les limites planétaires, le sport a une opportunité formidable pour se transformer, accroître sa résilience et organiser son développement. Le sport peut et doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et sa consommation d’énergie pour entrer pleinement dans la modernité.

Le sport fait en effet face à des risques de trois natures différentes : risque physique, face aux impacts du changement climatique ; risque d’approvisionnement, face à la déplétion des ressources naturelles, pétrole et gaz en tête ; risque de transition, s’il ne s’organise pas pour prendre à bras-le-corps la transition à sa manière et subit à la place une transition organisée par les secteurs dont il dépend. 

Le présent rapport traite des stades, et plus particulièrement : 

  • des matchs de football et rugby professionnels nationaux (Ligue 1, TOP 14, etc.), européens (Champion’s Cup etc.) et internationaux (équipe de France)
  • des stades et clubs amateurs, où près de 2,5 millions de licenciés se rejoignent chaque semaine pour pratiquer leur sport et partager des moments de convivialité.

Notre analyse est basée sur les flux physiques liés aux activités dans les stades (kWh consommés, km parcourus par spectateurs et joueurs, nombre de burgers vendus, etc.). Elle montre que l’ensemble des émissions associées au football et au rugby amateurs et professionnels dans les stades représentent environ 1,7 million de tonnes de CO2e (figure 1) : 1,37 MtCO2e pour les activités amateurs et 310 000 tCO2e pour les matchs professionnels. Dans les deux cas, le transport est le premier poste d’émissions (environ 70% pour le professionnel et 50% pour l’amateur).

Figure 1 – Impact climatique du football et du rugby en France en émissions de gaz à effet de serre (GES)
Source : Calculs intermédiaires The Shift Project, 2024

Forte dépendance au pétrole, due avant tout aux transports : le football et le rugby vulnérables aux chocs énergétiques

Nos résultats montrent que les deux parties (amateur et professionnel) sont aujourd’hui très dépendantes des énergies fossiles, en particulier dans les transports. Cette dépendance est d’autant plus forte que les distances parcourues augmentent et que l’utilisation de modes de transport fortement consommateurs d’énergie fossile, tels que l’avion, s’intensifie. Par conséquent, les émissions de gaz à effet de serre se retrouvent considérablement plus élevées (figure 2). Cette dépendance aux énergies fossiles, couplée à la fragilité économique des acteurs du sport, soulève de sérieuses préoccupations quant à la capacité du secteur à faire face aux chocs énergétiques et climatiques à venir.

Figure 2 – Empreinte carbone par spectateur et par match (en kgCO2e)
Source : Calculs intermédiaires The Shift Project, 2024
Lecture : Le volume des carrés représente la quantité d’émissions par match et par spectateur.

Réduire la dépendance au pétrole et l’impact du climat du football et du rugby est possible : bien qu’encore à affiner, les leviers semblent nombreux

Dans l’état actuel de nos connaissances, les résultats indiquent que, sous des conditions strictes d’activation de l’ensemble des leviers et de transformation forte du reste de l’économie (en particulier de décarbonation du secteur des transport), l’atteinte des objectifs climatiques généraux de la Stratégie Nationale Bas-Carbone (-83%) d’ici à 2050 semble possible (figure 3). Ces transformations demanderont des efforts importants à l’ensemble des parties prenantes (clubs, pouvoirs publics, ligues, spectateurs, etc.). Elles sont des conditions sine qua non pour construire un secteur plus résilient face aux risques énergétiques et climatiques.

Figure 3 – Émissions de GES du  foot et du rugby pro après transformation
(dans le cas de la variante BUT 2 « Diminution du nombre de rencontres internationales »)
Source : Calculs intermédiaires The Shift Project, 2024

Décarbonation des transports : l’électrification des voitures ne suffira pas, il faudra aussi réduire les distances parcourues par les spectateurs et les équipes

Nous considérons comme un pari très risqué de miser sur une décarbonation trop renforcée des industries automobiles et surtout du secteur de l’aérien d’ici 2050. Tabler sur un scénario impliquant une décarbonation moyenne (déjà optimiste) du secteur aérien et des industries automobiles (variante “BUT”, figure 4), qui engage déjà des efforts très importants, nous paraît plus judicieux en vue des trajectoires actuelles des secteurs concernés, donc plus protecteur du football et du rugby. Comme représenté dans la figure 4, l’objectif de la SNBC de -83% des émissions d’ici 2050, qui vise à respecter l’Accord de Paris, n’est pas atteint dans le cas d’une décarbonation moyenne du secteur aérien et des industries automobiles si l’on ne réduit pas les distances parcourues.

Figure 4 – Variantes envisagées et potentiel de décarbonation d’ici 2050 identifié pour le football et le rugby professionnel
Source : Graphique intermédiaire The Shift Project, 2024

Nous approfondirons dans nos prochains travaux nos recherches sur ces différentes variantes ainsi que sur les leviers de transformation à activer. Nous déterminerons dans notre rapport final (prévu pour février 2025) de combien les émissions du secteur doivent baisser pour s’inscrire dans le cadre de la SNBC (a priori, il sera plutôt question d’une baisse de -90% que de -83 % si on prend en compte les spécificités du secteur).

Pourquoi intégrer le sport amateur ? Régulièrement mis en lumière, le sport professionnel ne représente pourtant que la partie émergée de l’iceberg des activités sportives dans les stades. La France est maillée d’un tissu de 175 000 associations sportives, qui sont animées par trois millions de bénévoles. A lui seul, le football regroupe 12 000 clubs et 400 000 bénévoles, engagés d’une saison à l’autre ou de manière ponctuelle, qui participent activement à la création d’un environnement solidaire et inclusif.

Loin de vouloir pointer des « responsabilités », ce rapport montre simplement l’empreinte carbone des activités amateur, celle des activités professionnelles et leur empreinte agrégée. Il montre également la dépendance aux énergies fossiles de ces activités, et montrera d’ici le rapport final les voies de décarbonation possibles. Aucun joueur ne gagne ni ne perd un match seul : chacun avec ses spécificités va devoir jouer collectif dans le match éliminatoire contre le changement climatique et la déplétion des ressources fossiles.

Contacts


Nous remercions particulièrement le groupe de travail : Jimy Bercon, ancien athlète de haut niveau en kayak et consultant indépendant sport-environnement ; Mael Besson, fondateur de l’agence SPORT 1.5Anthony Ceffa Decauville, chargé d’impact RSE Développement Durable Sport Planète, MAIF, ancien Store Manager chez Décathlon ; Amélie Clerc, membre de Pour un réveil écologique, co-fondatrice Les Climatosportifs ; Franck D’Agostini, chef de projet RSE dans le secteur sportif ; Olivier Descout, expert carbone  consultant à Lamy Environnement et conférencier Shifter ; Aurélie Dyèvre, vice-présidente SporTech FR ; Clara Girard, manager en transition écologique dans le sport et ex-responsable développement durable au Stade de France ; Guillaume Gouze, consultant sport A4MT et CDES, ancien stadium manager ; Louis Hulot, navigateur Mini Transat’, ingénieur centralien et data scientist ; Véronique Martin, fondatrice du cabinet de conseil RSE-Sport ; Thibaut Valour, chargé de mission pour l’Institut du Sport Durable.

Nous remercions le Centre de Droit et d’Économie du Sport (CDES) et Lamy Environnement pour leur soutien précieux en expertise et en données, ainsi que que Action for Market Transformation (A4MT), FluxVision, les Climatosportifs, la Ligue de Football Professionnel (LFP), la Fédération Française de Football (FFF) avec le cabinet Utopies, la Fédération Française de Rugby (FFR) et la Ligue National de rugby (LNR) et les nombreux clubs et ayant eux aussi contribué par leurs retours et données.

Le Shift Project remercie enfin MAIF, pour son soutien financier dans le cadre du mouvement Sport Planète : « Convaincue que le sport est un formidable vecteur pour faire évoluer les consciences, la MAIF déploie, depuis 2020, son mouvement Sport Planète. C’est en mettant à disposition de tous et gratuitement, un ensemble de ressources et en organisant des actions que MAIF entend sensibiliser à la pratique d’un sport plus respectueux de l’environnement. Que ce soit par le soutien à des porteurs de projets inspirants, des écoaventuriers engagés, des événements sportifs qui entament une démarche exemplaire, MAIF se joint au monde sportif pour sensibiliser et favoriser une pratique sportive responsable. »


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