L’autopartage : oui, mais seulement en complément d’alternatives à la voiture en solo

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Une grande partie de l’opinion publique et des classes économique et politique considère le développement de l’autopartage comme une clef essentielle de la mobilité verte du futur. Or, peu d’études existent concernant l’effet réel de l’autopartage sur l’environnement.

Dans cette note d’analyse publiée initialement en décembre 2017, The Shift Project a donc souhaité estimer le bilan CO2 de l’autopartage. Il montre que l’effet positif de ce dernier est loin d’être évident : significatif en complément d’alternatives à la voiture en solo, il est au contraire négligeable si ces alternatives ne sont pas développées sur les territoires.

Auteur : Nicolas Raillard, The Shift Project

Fournir une estimation de l’impact CO2

Les enquêtes nationales existantes ne proposant pas d’estimation de l’impact CO2 de l’autopartage (AP), l’objet de cette analyse est d’apporter une telle estimation. Cette note traite d’autopartage en boucle (la voiture, en libre service, est prise à une station donnée, et doit être déposée à cette station à la fin du trajet ; les tarifs sont adaptés pour un usage à l’heure de la voiture).

L’autopartage peut induire différents effets sur la composition du parc de voitures, sur l’usage de ce parc et donc sur ses émissions de CO2 (au sens de l’Analyse de Cycle de Vie, ACV) :

  • Un effet de renouvellement prématuré du parc de voitures (appelé effet renouvellement prématuré dans cette note), qui se traduit par l’intégration prématurée de voitures neuves dans le parc de voitures.
  • Une réduction du nombre de voitures à l’échelle du parc, et l’augmentation du rythme de remplacement des voitures que cela induit (effet démotorisation).
  • Un effet de réduction du trafic de voitures (effet moindre usage) dû au moindre usage de la voiture observé en moyenne chez les usagers d’autopartage.

Un impact très différent selon les territoires

Nous montrons que le développement de l’autopartage aura des effets différents selon qu’il s’établisse dans les zones à haute alternative à la voiture (HAV), ou dans des zones à faible alternative à la voiture (FAV).

Nous montrons que dans ces deux zones, l’effet renouvellement prématuré est négligeable. Dans les zones HAV, les effets démotorisation et moindre usage se combinent grâce à la présence d’alternatives à la voiture. Ces zones ne se concentrent pour l’instant que dans l’urbain dense des grandes agglomérations, où la présence de la voiture est déjà faible. Ainsi, seules 6 % des distances quotidiennes parcourues par des voitures en France métropolitaine sont potentiellement concernées. Les 94 % restantes sont parcourues par des habitants des zones FAV, où seul l’effet démotorisation existe.

Un résultat en termes de réduction des émissions limité en l’état actuel

Ainsi, le potentiel maximal de réduction des émissions par l’AP est actuellement d’environ 6 %, en tenant compte de ses (faibles) effets dans les zones FAV (effet démotorisation seul), et de ses effets (démotorisation et moindre usage) combinés grâce aux alternatives à la voiture, dans les zones HAV.

Sans le développement d’une offre d’alternatives efficaces à la voiture dans les zones moyennement denses et aux agglomérations de taille moyenne et petite, l’autopartage, même implanté massivement, ne peut pas espérer réduire de plus de 6 % les émissions de CO2 de la mobilité.

La clef : développer les alternatives à la voiture hors des villes

Dans chaque zone FAV qui devient ainsi HAV, ce potentiel passe de 4 % à plus de 35 %. Ainsi, pour que l’autopartage ait un impact carbone positif significatif, il doit constituer un complément à une offre d’alternatives efficaces à la voiture (que ce soit par une réduction du besoin en mobilité, ou par un report modal vers des modes moins carbonés).


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