« Décarbonons les Stades » : The Shift Project publie son rapport intermédiaire

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L’équipe Sport du Shift Project vous présente son rapport intermédiaire estimant l’empreinte carbone des grandes manifestations sportives dans les stades, donc des matchs et des stades. Rendez-vous ce mardi 19 mars au matin sur Facebook Live ou sur Zoom pour assister à la présentation !

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Votre participation aux travaux 

Le travail qui vous est présenté ici est exploratoire : il vise à initier de nouvelles discussions et pose sur de nombreux sujets davantage de questions qu’il n’en résout. Bien qu’il soit déjà le fruit d’un travail collectif, ce rapport intermédiaire est encore un document de travail imparfait, incomplet et évolutif. Dans cette logique, nous vous prions d’envoyer vos remarques, critiques et propositions à l’adresse suivante : sport@theshiftproject.org

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Nous avons besoin de vous : toutes les relectures et contributions sont les bienvenues !


Pourquoi s’intéresser au Sport ?

Pourquoi nous, acteurs et actrices du secteur sportif, souhaitons que le sport soit abordé par le Shift Project, qui travaille sur le climat et l’énergie ? Le sport est un contributeur majeur au développement humain, un puissant facteur de cohésion sociale et de rapprochement des peuples. Rares sont les secteurs pouvant réunir pendant quelques heures des millions – voire des milliards – de personnes autour d’un même moment : à la fois festif et rempli d’émotions, de joie, parfois de déception et de tristesse, mais qui le rend si unique.

Le sport propose une caisse de résonance sans pareil (23 millions de personnes suivent par exemple la Ligue 1 de football), et permet de diffuser des messages structurants – celui de la décarbonation par exemple – et ainsi de vulgariser le propos, l’expliquer, et structurer les réflexions à grande dimension. Au-delà de ça, nous avons la conviction que le sport a le pouvoir, à son échelle, de transformer la société.

Un travail initié par un collectif d’amoureux du sport

La première mission pour s’emparer du sujet sport a d’abord été de constituer une équipe : un collectif d’amoureux du sport capable d’apporter leur expérience, leur connaissance et leur expertise. Un collectif qui souhaite donner toutes les clés au secteur pour qu’il puisse s’organiser pour perdurer, qu’il continue à nous faire vivre et à nous faire rêver.

Nous, anciens sportifs de haut niveau, athlètes, sportifs amateurs, cadres de structures, membres d’associations, techniciens et experts du milieu ou tout simplement passionnés de sport, avons de l’ambition pour notre secteur.

Parce que nous voulons continuer à pratiquer, continuer à nous réjouir, continuer à nous émouvoir.

Parce que, fidèles à la devise olympique « plus vite, plus haut, plus fort », nous relevons le défi collectif de l’atteinte des objectifs climatiques, et souhaitons répondre « présent ! » sans tricher. 

La double contrainte carbone – d’un côté le réchauffement climatique, de l’autre la déplétion des ressources énergétiques – a une forte dimension technique et est potentiellement anxiogène. Sachant cela, en aucune manière l’objectif n’est de culpabiliser le secteur, d’effrayer ses professionnels, ou d’en grever son activité. L’ambition est au contraire de le transformer pour permettre au plus grand nombre, d’une part, de continuer à aller voir des manifestations sportives, et d’autre part, de continuer à pratiquer une activité régulière, dans le cadre des objectifs climatiques et sans craindre la blessure en cas de crise énergétique.

Une première brique : décarboner les grandes manifestations sportives dans les stades

La première brique du programme Sport s’attache à dessein à un périmètre réduit, celui des manifestations sportives dans les stades de football et de rugby professionnels. Près d’un an de travail nous a permis de voir qu’au fur et à mesure du travail préparatoire, les notions de décarbonation et de lutte contre le changement climatique se généralisent dans la conscience des acteurs sportifs, en premier lieu celle des médiatiques clubs professionnels. Leur grande majorité a conscience d’être des exemples, et qu’ils peuvent et doivent être des sources d’inspiration. 

Ce travail est présenté et discuté lors d’un événement dédié le 19 mars 2024. Il pourra monter en puissance, selon la méthode itérative usuelle du Shift Project, qui consiste à accueillir des précisions additionnelles : la balle est dans votre camp !

Synthèse provisoire des résultats

Le sport a une opportunité formidable d’organiser sa transformation pour être résilient et se développer à sa manière au XXIe siècle, où la prise en compte des contraintes environnementales devient une condition de survie et a fortiori de développement. Le sport peut et doit réduire ses émissions de gaz à effet de serre et sa consommation d’énergie pour entrer pleinement dans la modernité.

Le sport fait en effet face à des risques de trois natures différentes :

  • risque physique, face aux impacts du changement climatique ;
  • risque d’approvisionnement, face à la déplétion des ressources naturelles, pétrole et gaz en tête ;
  • risque de transition, s’il ne s’organise pas pour prendre à bras le corps la transition à sa manière et subit à la place une transition organisée par les secteurs dont il dépend. 

Si le risque physique est déjà documenté (voir le rapport « Dérèglement climatique : le monde du sport à +2°C et +4°C » du WWF), le risque d’approvisionnement et le risque de transition le sont moins. De même, il existe peu de rapports ensembliers sur l’empreinte carbone du secteur.

Échantillonnage de stades et de matchs

Le présent rapport traite des stades, et plus particulièrement des manifestations sportives nationales de football et de rugby professionnels (Ligue 1 Uber Eats, Ligue 2 BKT, TOP 14, PRO D2) et européennes (pour les clubs engagés dans ces compétitions) ; se déroulant dans les grands stades français de plein air, en tant que réceptacles du spectacle sportif et non uniquement infrastructures « de béton, de verre et d’acier » ; en analysant notamment les données physiques de capacité, d’affluence, et d’usage, en déterminant les flux et en mobilisant la discipline de la comptabilité carbone.

Cet échantillonnage réduit offre la possibilité de capitaliser sur le retour d’expérience de « faiseurs ». Les clubs professionnels, qu’ils soient gestionnaires, exploitants ou utilisateurs de ces infrastructures complexes, sont tous organisateurs de manifestations sportives. Ils ont engagé des démarches, parfois depuis plusieurs années, et bénéficient de données et d’un retour d’expérience partageable et duplicable. 

Premières conclusions

Quelles conclusions ont pu être tirées de l’analyse des données ? Le périmètre de l’étude est constitué des flux physiques liés aux manifestations sportives dans les stades (kilowatts consommés, kilomètres parcourus par spectateurs et joueurs, nombre de burgers vendus…). Notre analyse porte sur trois types de stade, déterminés par leur capacité, leur affluence et leur usage : « stade intermédiaire » (capacité d’environ 15 000 places), « grand stade » (35 000 places) et « très grand stade » (50 000 places). Nous en avons provisoirement tiré les conclusions suivantes : 

  • Le transport des spectateurs est le poste d’émission de gaz à effet de serre (GES) le plus important lors d’une rencontre, représentant près de 65% des émissions (dont 90% sont dûes à l’usage de la voiture). L’alimentation et les boissons constituent le deuxième poste, soit environ 15% des émissions totales. Enseignement important : ces proportions sont similaires entre les trois types de stades.
  • Sans surprise, en valeur absolue, les émissions de GES par match sont corrélées au nombre de spectateurs dans le stade. En outre, ce sont les matchs, donc leur nombre et leur affluence, qui contribuent pour la plus grande partie aux émissions annuelles d’un stade. D’après nos résultats, les émissions d’un très grand stade s’élèvent à près de 320 tonnes de CO2 équivalent par match (et près de 8000 tCO2e par an, soit les émissions annuelles équivalentes d’environ 800 français), celles d’un grand stade à près de 175 tCO2e/match (environ 3500 tCO2e par an) et celles d’un stade intermédiaire d’environ 65 tCO2e/match (environ 1200 tCO2e par an).

Figure 1 – Composition de l’empreinte carbone d’un match selon la taille du stade
(en pourcentage)
Source : calculs provisoires The Shift Project, 2024

  • Un spectateur émet en moyenne 10 kg de CO2e/match, avec de fortes disparités. Les émissions associées au déplacement du spectateur local sont faibles (proches de 4 kg de CO2e/match). Celles d’un spectateur extérieur national seront près de 15 fois plus élevées (60 kgCO2e/match) et pour des compétitions internationales de clubs, ces émissions peuvent être jusqu’à 600 fois plus importantes pour les spectateurs faisant de longues distances (Tableau 1).

Tableau 1 – Comparaison de l’impact carbone du transport de différents spectateurs sur un match
dans un “Grand Stade”
Ces valeurs sont tirées des résultats de la Typologie 2 “Grand stade”,  s’inspirant d’un stade de rugby de première division de championnat national et international. La borne basse correspond à une rencontre entre une équipe française et une équipe anglaise (70% des km effectués en voiture, 17% en train, 12% en car et 1% en avion). La borne haute correspond à une rencontre entre une équipe française et sud-africaine (100% des km effectués en avion).
Source : calculs provisoires The Shift Project, 2024

  • Ainsi, le type de compétition semble être déterminant sur les émissions de GES. C’est logique : les distances entre les équipes augmentent avec les matchs internationaux, ce qui intensifie l’impact carbone des transports, les deux déterminants principaux de cet impact étant le nombre de kilomètres parcourus et le mode de transport (l’avion, le mode de transport le plus carboné, est d’autant plus pris que la distance est grande).

Figure 2 – Empreinte carbone de trois types de matchs dans un « Grand stade »
(en valeur absolue en tCO2e)
Le “match national moyen” correspond à une rencontre moyenne de première division nationale de rugby. Le “match national international – borne basse” correspond à une rencontre internationale de clubs de faible distance (Londres – Lyon) et le “match international – borne haute” correspond à une rencontre internationale de clubs de distance élevée (Pretoria – Lyon)
Source : calculs provisoires The Shift Project, 2024

En conclusion, il convient de rappeler que ces données de ce rapport intermédiaire sont provisoires. Elles doivent désormais être confrontées à l’expertise des acteurs du secteur. Les conclusions et mesures de réduction seront présentées dans le rapport final à l’été.

Contacts


Nous remercions particulièrement le groupe de travail : Jimy Bercon, ancien athlète de haut niveau en kayak et consultant indépendant sport-environnement ; Mael Besson, fondateur de l’agence SPORT 1.5 ; Justine Birot, directrice au sein de l’Association de l’Institut du Sport Durable, co-pilote du rapport pour The Shift Project ; Anthony Ceffa Decauville, chargé d’impact RSE Développement Durable Sport Planète, MAIF, ancien Store Manager chez Décathlon ; Amélie Clerc, membre de Pour un réveil écologique, co-fondatrice Les Climatosportifs ; Franck D’Agostini, chef de projet RSE dans le secteur sportif ; Aurélie Dyèvre, vice-présidente SporTech FR ; Clara Girard, manager en transition écologique dans le sport et ex-responsable développement durable au Stade de France ; Guillaume Gouze, consultant sport A4MT et CDES, ancien stadium manager ; Louis Hulot, navigateur Mini Transat’, ingénieur centralien et data scientist ; Alan Lemoine, ancien sportif de haut niveau en planche à voile olympique, co-pilote du rapport et chargé de projet Sport, The Shift Project ; Véronique Martin, fondatrice du cabinet de conseil RSE-Sport ; Thibaut Valour, chargé de mission pour l’Institut du Sport Durable ;

Nous remercions également le Centre de Droit et d’Économie du Sport (CDES) pour son soutien précieux en expertise et en données, notamment au travers de Guillaume Gouze.

Le Shift Project remercie enfin MAIF, pour son soutien financier dans le cadre du mouvement Sport Planète : « Convaincue que le sport est un formidable vecteur pour faire évoluer les consciences, la MAIF déploie, depuis 2020, son mouvement Sport Planète. C’est en mettant à disposition de tous et gratuitement, un ensemble de ressources et en organisant des actions que MAIF entend sensibiliser à la pratique d’un sport plus respectueux de l’environnement. Que ce soit par le soutien à des porteurs de projets inspirants, des écoaventuriers engagés, des événements sportifs qui entament une démarche exemplaire, MAIF se joint au monde sportif pour sensibiliser et favoriser une pratique sportive responsable. »


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